Toute la délicatesse et l’inventivité des premières créations d’Émile Gallé. S’il ne réalise pas lui-même ses verreries, il en est le véritable concepteur, imaginant des décors et des formes et donnant des instructions très précises pour leur fabrication, centralisée à Meisenthal, en Lorraine, jusqu’à ce qu’il fonde, en 1894, une cristallerie à Nancy. Bien qu’ayant commencé en 1877, dans l’entreprise familiale, en prolongeant le style néo-Louis XVI de son père, il lance rapidement, en parallèle, une production puisant à la source de l’art japonais dans laquelle la nature et les animaux tiennent une place privilégiée. Gallé possède dans sa collection personnelle de nombreuses estampes et objets du Japon, dont il s’inspire afin de créer des pièces très libres, à l’image de nos deux vases rouleau au verre transparent, sur lequel a été apposé un délicat décor d’émaux, très graphique, à motifs d’éléments végétaux et de libellules. On perçoit également dans leur piétement de forme florale les premiers essais de coloration du verre dans la masse, ici un délicat bleu clair symbolisant l’eau au-dessus de laquelle volent les libellules. Ces insectes figurent en bonne place dans le bestiaire de l’artiste. Symbolisant la fragilité de la vie, ils sont également les protagonistes d’une série sur le thème de la tristesse, datée autour de 1889, dont certains exemplaires sont signés par Gallé avec la mention «fait par l’amant des frissonnantes libellules».