Recouverte de perles polychromes, cette statue est celle d’une femme assise qui se serait cachée derrière une autre peau. Elle impose cependant sa présence de manière forte. La technique des perles brodées était particulièrement considérée dans l’art des Bamouns du royaume du Grassland, à l’est et au nord-est du Cameroun. Les rois eux-mêmes revendiquaient des statues-trônes en bois ainsi décorées. Au XVIIe siècle, Ncharé Yen, Tikar de Bankim, fonde son royaume en combattant dix-huit chefs locaux. Les sociétés secrètes jouent un rôle essentiel dans la consolidation du pouvoir royal ; la société bamoun est hiérarchisée, chaque dignitaire détenant les objets correspondant à sa fonction et décorés de motifs permettant de l’identifïer. Cette culture a connu son apogée sous le règne du sultan Njoya (1889-1933), qui régnait à l’arrivée des Allemands. Sur plusieurs photos de cette époque, on remarque les trônes sculptés et brodés de perles, les danseurs masqués et les statues entièrement revêtues de ces tissus perlés. Celle-ci est peut-être une effigie d’une reine défunte. Sa polychromie, la force de ses volumes ont séduit l’œil de Carl-Otto Hultén (1916-2015), peintre suédois membre du groupe CoBrA et collectionneur d’art africain. Autre vedette du chapitre africain de la vente : un masque ligbi du cercle de Bondoukou, en Côte-d’Ivoire. En bois orné de laiton et de clous de tapissier, assorti lui aussi d’une estimation autour de 15 000 €, il était utilisé lors des cérémonies du culte «do». Pour ces danses, les masques étaient huilés et parés de bijoux, dans le but de souligner la puissance et le rang du maître du culte. Sous les hautes cornes courbes, flanquées de courtes oreilles, le visage s’étire jusqu’au menton en pointe, les commissures des lèvres ouvertes et la joue gauche portant des scarifications. Bondoukou est une ville plus ancienne que Djenné, située sur la route du commerce du kola et de l’or. Une richesse qui encouragea la production d’un art raffiné et hautement décoratif.