Deux livres autobiographiques de Fernande Olivier (1881-1966), modèle, artiste et écrivaine, ont dicté le propos de l’exposition : Picasso et ses amis, publié en 1933, qui nous plonge dans la bohème et la vie du Bateau-Lavoir, et Écrits sur Picasso (1988), paru à titre posthume sous forme de journal, relatant sa jeunesse difficile, sa quête d’émancipation et sa rencontre avec le maître. Plus de quatre-vingts œuvres, documents, peintures, sculptures, gravures, photos, accompagnent ces deux récits de souvenirs. Pour Nathalie Bondil et Saskia Ooms, commissaires de l’événement, «la vie de Fernande est une biographie de la condition féminine d’autrefois, dont l’écho résonne encore de nos jours». À la fois chronologique et thématique, le parcours se divise en une dizaine de chapitres révélant les différents aspects de sa personnalité : la femme de lettres et peintre, dont quelques œuvres comme un Autoportrait et Les Trois Vierges invitent à franchir le seuil ; Fernande dans l’intimité du Bateau-Lavoir, témoin des avant-gardes, du fauvisme au cubisme, voyant leurs acteurs «vivre, penser, souffrir, espérer et surtout travailler», écrira-t-elle ; son portrait sous les multiples palettes des peintres de l’époque, dont Pablo bien sûr, mais aussi Kees Van Dongen, Matisse, Ricard Canals ; l’amie de leurs compagnes ou d’artistes confirmées et indépendantes, telles Marie Laurencin ou Suzanne Valadon ; enfin, l’autrice et ses mots, avec ses citations affichées sur les cimaises, auxquelles l’artiste invitée Agnès Thurnauer rend un hommage tout en finesse dans un dessin (Into Abstraction #1). Fernande, c’est aussi l’incommensurable amour qu’elle voue à Picasso au-delà des années 1905 et 1912, où ils vécurent en couple. Pablo est et restera l’homme de sa vie.