L’influence de Vilhelm Hammershøi semble ici évidente, et pour cause : l’auteur de cette paisible scène d’intérieur n’est autre que le frère de son épouse Ida, Peter Ilsted. Les deux maîtres de la peinture danoise seront bientôt confrontés au sein d’une même exposition, du 14 mars au 22 juillet au musée Jacquemart-André à Paris ; en France, il s’agit d’une première, mais à New York en 2001, le Metropolitan Museum avait déjà fait dialoguer ces deux voix avec celle de Vermeer. Avec leur ami commun Carl Holsøe (1863-1935), ils créent vers 1880 le mouvement de «l’exposition libre», qui prône une peinture du silence faisant écho à la tranquillité affichée par la classe moyenne du Danemark au tournant du XXe siècle, volontairement isolée de la tourmente politique et sociale que subit alors le reste de l’Europe. Une peinture bourgeoise, en somme, qui séduit de plus en plus les collectionneurs aujourd’hui. Si Hammershøi (1864-1916) ne cesse de repousser les limites de sa cote, le travail de son beau-frère demeure plus abordable. L’inquiétude ambiante, l’austérité des cadres presque intemporels et la distance des sujets caractéristiques de son aîné font place, chez Peter Ilsted, à des scènes davantage ancrées dans la vie quotidienne, des personnages plus accessibles et des coloris plus chauds et nuancés. Ici, dans cette toile de 1896, le modèle serait Liselund, la propriétaire du manoir qu’Ilsted louait régulièrement l’été, au début du siècle dernier, pour y trouver l’inspiration.