Grâce aux échanges épistolaires de la Palatine, le catalogue raisonné d’Hyacinthe Rigaud conte par le menu l’exécution de ce portrait de belle prestance.
On le sait, Charlotte-Élisabeth de Bavière, princesse palatine, née en 1652 n’avait pas sa langue dans sa poche, et ce n’était pas la moindre de ses qualités. À sa mort, elle laissa quelque 90 000 lettres, où elle dépeignait au gré de ses humeurs la vie quotidienne à Versailles, n’épargnant personne hormis Louis XIV, qu’elle admirait par-dessus tout. Dans plusieurs missives rédigées en allemand – sa langue maternelle –, elle relate les séances de pose de son protégé, Eberhard von Harling (1665-1729), originaire de Hanovre comme elle, dans l’atelier du peintre Hyacinthe Rigaud. Celui-ci se consacre au portrait, genre qu’il a élevé à sa plus haute expression. Outre la cour, il peint toute la haute société de son temps, sa renommée dépassant largement les frontières du royaume. Il était tout à fait logique qu’en 1722 il soit choisi pour fixer en buste la figure de celui que la Palatine – devenue depuis la mère du régent – avait amené dans ses bagages et qui était à son service depuis ses 6 ans. Ses bons offices pour la couronne de France ont aussi valu à von Harling d’être nommé chevalier de l’ordre de Saint-Louis et maréchal de camp en 1718. Pour ce qui est de la séance du 19 avril, la princesse rapporte que le modèle la supporta difficilement et dut s’asseoir à trois reprises : victime de sa gourmandise, il avait dévoré un petit cochon de lait ! Le 10 août, elle se réjouit que le tableau soit en passe d’être terminé car si Rigaud est un excellent peintre, sa conversation, du fait de son bégaiement, est des plus désagréables !