Les céramistes de Chine ont eu le don de faire ressembler leurs porcelaines à un Éden au milieu duquel fleurs, feuilles et fruits s’épanouissaient en toute liberté. Et c’est bien en raison de ce talent que les Occidentaux ont fait appel à eux, pour des pièces de commande destinées à être rapportées en Europe et en orner les plus belles tables. Cette partie de service, à décor dit «pseudo feuille de tabac», illustrait cette vision idyllique avec son ornementation en plein de fleurs d’hibiscus, de grenades et de feuillages. Elle était emportée à 47 212 €. Au XVIIIe siècle, les différentes Compagnies des Indes anglaise, néerlandaise et française sont toutes-puissantes et ont la mainmise sur le commerce entre les royaumes de l’Ouest et l’empire du Milieu. Le règne de Yongzheng (1722-1735) et plus encore celui de Qianlong (1736-1796) contribuent à les favoriser. En 1650, le pourpre de Cassius un précipité obtenu à partir de sel d’or est mis au point en Hollande. La formule de cette teinte est rapidement divulguée et les Chinois se mettent à en parer des porcelaines, réunies sous le nom de «famille rose», essentiellement pour l’exportation. Leurs décors sont riches et celui nommé «pseudo feuille de tabac», l’un des plus recherchés. Son origine est certainement dérivée des motifs des textiles indiens et apporte une nouvelle preuve de la vivacité des échanges entre les différentes civilisations de l’Orient lointain.