Moins touffue et plus muséale : ainsi se présente la dernière édition de Circulation(s) qui, depuis neuf ans, permet de découvrir de nombreux jeunes photographes européens. Le festival doit ce nouvel élan à un changement de direction artistique, désormais confiée à The Red Eye, une structure réunissant Audrey Hoareau et François Cheval, deux anciens du musée Nicéphore Niépce de Chalon-sur-Saône. Le parcours, réparti dans quatre lieux du Centquatre, s’articule en cinq thématiques représentatives de la photo contemporaine : la réutilisation des archives, le corps et les souffrances, les paysages et la nature, la notion de territoires et la photographie documentaire. L’ensemble se fait le reflet du monde d’aujourd’hui, souvent sombre et sans concession. Les 38 artistes invités ou sélectionnés par un jury contre 52 l’année dernière déclinent des écritures variées, du noir et blanc à la couleur, du tirage sagement accroché à des installations et des vidéos. Focus sur le Français Mathieu Farcy (1992) et sa série «Chers à canons» rendant hommage aux gueules cassées de la Première Guerre mondiale à travers des portraits d’archives dont les blessures sont occultées ; les images saisissantes de la Britannique Chloe Rosser (1991) qui érige les corps en statue par le jeu de la contorsion. Ailleurs, c’est la notion d’archives récupérées auprès d’un compatriote anarchiste des années 1990 que l’Italien Umberto Coa (1988) interroge avec une série confrontant petits formats noir et blanc à des objets et documents. Plus classique est le travail documentaire de l’Allemand Emile Ducke (1994), qui a embarqué à bord du Saint Lukas, un des cinq trains médicaux financés par le gouvernement russe faisant halte dans les villes reculées de Sibérie, ou celui de la Russe Anna Cherednikova (1986), qui magnifie les mauvaises herbes parvenant à pousser dans les fissures bétonnées des villes. Une nouvelle fois, Circulation(s) vaut le détour.