Avec une offre en hausse, la foire d’art moderne et contemporain confirme son ancrage au bord de la Garonne. Elle devra toutefois attirer davantage de collectionneurs régionaux pour durer.
Et de deux ! À Bordeaux, du 5 au 7 mai, Bad+ a franchi un cap. Passés le baptême du feu l’an dernier et l’effet de surprise, il fallait, pour cette deuxième édition, convaincre. Un gros enjeu pour le cofondateur, Jean-Daniel Compain, enfant de la région et ancien de la FIAC, et pour Adrien de Rochebouët, conseiller artistique de l’événement. Il s’agissait en effet d’attirer les collectionneurs potentiels du Bordelais, et plus largement du Sud-Ouest jusqu’au Pays basque, tout en renforçant l’écosystème local – en plus d’un zeste de Parisiens, dont certains ont des liens personnels ou familiaux avec la région ! Plusieurs galeries espagnoles ont d’ailleurs participé tandis que le pari semblait réussi avec la présence d’enseignes reconnues comme Loeve&Co, Rabouan Moussion, Christian Berst, Vincent Sator, Anne-Sarah Bénichou, Dumonteil Contemporary…
Sans connaissance préalable du public, une majorité d’exposants parisiens avaient largement misé sur des œuvres accessibles. Christian Berst – Art brut a ainsi vendu des pièces de Kunizo Matsumoto (à moins de 1 000 €) et des grands dessins colorés de Momoko Nakagawa (à 4 000 €) comme des petits pains. Accolé à Loeve&Co, le programme Loeve&Collect proposait pour 2 000 € ou moins des dessins originaux de l’architecte Tadao Ando ou de l’artiste Dora Maar. La galerie Loeve&Co, elle, montrait des peintures plus onéreuses de Robert Coutelas, ou plus récentes de Cyril Duret. De son côté, Vincent Sator s’est séparé de quelques pièces «entre 2 000 et 6 000 €, notamment de Raphaël Denis et Evangelia Kranioti, vendues à des collectionneuses bordelaises», précise-t-il. Parmi les présentations originales figuraient celles de la galerie A2Z, avec un mini-cabinet sombre et puissant comme les peintures de la Japonaise Shiori Eda.
Mais une foire régionale se doit aussi d’accueillir un nombre important de galeries provinciales, sauf à vouloir devenir une mini-foire parisienne ! Si le niveau des enseignes régionales restait inégal, particulièrement au rez-de-chaussée, plusieurs marchands se distinguaient par leurs efforts. Tel Muscari, de Pau, qui exposait des plats en céramique de Picasso et des gravures de Soulages. Ou Artset, de Limoges, qui misait notamment sur une toile monumentale d’un jaune éclatant du Suédois Bengt Lindström et un important tissu peint de Claude Viallat à plus de 70 000 €. Le succès a été au rendez-vous. «Nous avons vendu des œuvres chères et largement rentabilisé le stand», confie Antoine Hyvernaud, directeur associé d’Artset. Sont partis, entre autres, un Alechinsky à 44 000 € – achat d’un Bordelais –, un Riopelle et une autre œuvre de Viallat. «J’ai été un peu déçu par la fréquentation – il n’y a pas eu énormément de visiteurs même si ceux-ci étaient des connaisseurs –, mais nous nous en sortons finalement très bien», poursuit le marchand.
Selon les organisateurs, 6 300 visiteurs ont fait le déplacement. Parmi eux, certains propriétaires de grands vignobles bordelais se sont montrés acheteurs, mais pas forcément à des prix élevés. Un stand rappelait les différents avantages fiscaux dont bénéficient les entreprises quand elles acquièrent de l’art… «Le potentiel de la foire et sa qualité sont évidents, mais cette édition était un peu décevante en termes de dynamisme. Il faut s’accrocher !» glisse un exposant. À l’avenir, des prix soutenus par des mécènes seraient les bienvenus pour encourager les exposants et ancrer davantage la foire sur la rive de la Garonne.
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