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À l’heure du bilan, le ballet des pinocchio

Publié le , par Vincent Noce

François Hollande, dont l’élection avait été favorablement accueillie par le milieu culturel, a esquivé cette rencontre avec un monde qu’il appréhende. Des présidents de la Ve République, il est celui qui aura montré le moins d’appétence pour les arts. Il ne laisse aucune réalisation propre ; il a même été le premier, cédant...

  À l’heure du bilan,  le ballet des pinocchio
 

François Hollande, dont l’élection avait été favorablement accueillie par le milieu culturel, a esquivé cette rencontre avec un monde qu’il appréhende. Des présidents de la Ve République, il est celui qui aura montré le moins d’appétence pour les arts. Il ne laisse aucune réalisation propre ; il a même été le premier, cédant à la pression d’Aurélie Filippetti, à avoir eu l’inélégance de supprimer le seul projet légué par son prédécesseur, pourtant modeste, celui de la Maison d’histoire de France. Il a été terriblement desservi par les ministres qu’il a choisis, jusqu’à se résigner à nommer sa propre conseillère, chargée d’assurer le service minimum dans le bref laps de temps qui lui restait. Dès le début de son mandat, en contradiction avec ses engagements, le budget de la Culture a été amputé. «Il avait promis de refaire de la culture une priorité ; c’est l’inverse qui s’est produit», s’exclame aujourd’hui Arnaud Montebourg. Ministre de l’Économie, il avait pourtant lui-même parfaitement assumé cette renonciation, de même qu’Aurélie Filippetti, laquelle était allée jusqu’à se dire fière de la baisse de son propre budget. Les musées et monuments, tout ce tissu vital pour faire reculer l’ignorance et l’intolérance, ont été les premiers sacrifiés. Et ils le sont restés. Le rattrapage de 2017 a pour l’essentiel servi à rassurer le spectacle vivant en cette année électorale. Depuis 2004, la préoccupation première assignée aux ministres est d’éviter une perturbation des festivals, personne n’ayant eu le courage de réformer le régime dispendieux de l’intermittence.

Les musées et monuments, un tissu vital pour faire reculer l’ignorance et l’intolérance.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les crédits inscrits pour le patrimoine monumental sont tombés de 380 M€ en 2010 à un peu plus de 310 M€ par an de 2014 à 2016. Mais seulement 275 M€ ont été réellement engagés en 2015 et 290 M€ l’année suivante, la moitié de ce qui serait nécessaire pour le maintenir à peu près en état. Il faut lire l’adresse de «La Demeure historique» aux candidats, s’alarmant de l’écart entre les budgets adoptés et les dépenses effectives, qui a pu atteindre ces dernières années jusqu’à 30 %. Les réglementations et leur mise en œuvre sont infernales. La moitié des régions ne donnent pas un centime au patrimoine privé. Le nombre de monuments historiques ne cesse de croître et les aides, de décroître. Plus d’un millier se retrouve en vente, la durée de détention se réduisant à sept ans. Il peut être utile de rappeler ce bilan de son gouvernement au moment où Audrey Azoulay se propose de prendre la tête de l’Unesco, dont la principale vitrine est le patrimoine, auquel jusqu’ici elle n’a prêté qu’une attention distraite. Elle s’y pose en instigatrice de la campagne de François Hollande pour la culture menacée par le terrorisme et les guerres dans le monde, tout en rappelant l’adoption de la loi création et patrimoine, omettant de préciser que celle-ci a en fait été sauvée par le travail des sénateurs. Elle oublie aussi de rappeler qu’elle a bloqué l’amendement de Patrick Bloche, prévoyant que l’implantation d’éoliennes dans un rayon de dix kilomètres autour d’un monument historique  un des grands soucis de l’Unesco  soit soumise pour avis à la Commission régionale patrimoine et architecture. Tous ces ministres en campagne ont bien dû potasser Du mensonge en politique, cet «enfant à la naissance miraculeuse promis à un si grand destin», dont Jonathan Swift tissait l’éloge.

Précision
Suite à notre billet d’humeur paru dans la Gazette n° 12 du 24 mars 2017 (voir l'article
La spirale des trous noirs), M. Yves Bouvier nous prie de préciser que le prix auquel il a acheté le Klimt revendu à M. Dmitri Rybolovlev est de 126 M$, et non de 112 M$, comme l’indiquait le New York Times. Il tient aussi à indiquer que son ami Jean-Marc Peretti ne se trouvait pas avec lui quand il a présenté le Salvator Mundi à M. Rybolovlev à New York, en compagnie du responsable des ventes privées de Sotheby’s, Samuel Valette.

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