Découvert à la fin des années 1980, Trophime Bigot est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands peintres caravagesques français du XVIIe. Ce Saint Jérôme, qui lui est attribué, le confirmera sans nul doute.
En regardant cette impressionnante toile au cadrage serré, au réalisme frappant, au fond noir et aux effets de lumière offrant une expressivité maximale à la scène qu’elle représente (saint Jérôme devant un crucifix), on comprend pourquoi une grande partie des œuvres de Trophime Bigot étaient auparavant attribuées à Georges de La Tour ou à Gerrit van Honthorst. Ce sujet est néanmoins typique des œuvres de l’artiste, qui privilégie les compositions dépeignant des figures bibliques en gros plan dans un moment tragique de leur histoire. Le Christ moqué, La Libération de saint Pierre ou Saint Jérôme… autant de tableaux de Bigot que le marché nous a dévoilés depuis la fin des années 1980. Après le premier article lui ayant été consacré en 1988, écrit par l’historien Jean Boyer dans le Burlington Magazine, les discussions entre experts se sont succédé, et les avis diffèrent. Si Trophime Bigot a été un temps assimilé au «Maître à la chandelle», révélé par le spécialiste britannique Benedict Nicolson, il semble qu’il n’ait finalement pas de rapport avec celui-ci, auteur d’une trentaine d’œuvres à Rome, représentant des figures religieuses à mi-corps éclairées à la bougie, et aujourd’hui identifié comme étant l’Italien Massa. Bigot, quant à lui, correspondrait au peintre évoqué sous le nom de Trufemondi dans les chroniques romaines du XVIIe. Natif d’Arles, il s’y serait formé auprès de Louis Finson, artiste flamand très proche du Caravage qui séjourna en Provence vers 1613. Bigot part pour l’Italie, entre 1620 et 1634, demeurant en particulier à Rome, où il perfectionne son œil et son style. Il revient ensuite à Arles puis s’installe à Aix-en-Provence et à Avignon, réalisant de nombreuses œuvres pour les églises de la région, dans un style bien différent, plus classique, que ses créations caravagesques de l’époque romaine à laquelle se rattacherait ce Saint Jérôme.