Le monde de Mai-Thu

Maternités, femmes au bain, jeux d’enfants, musiciens… Les encres sur soie de Mai-Thu fleurissent ces dernières années en ventes publiques, tout comme les catalogues dédiés au thème de l’art du Vietnam. Au menu cette fois, ce portrait de jeune femme, probablement sa muse. Elle apparaît en effet à de nombreuses reprises, perdue dans ses pensées, le visage protégé du soleil par le chapeau traditionnel, dont les teintes de blanc et de bistre répondent à celles du fond et de sa robe, sur laquelle se détache une fine torque. Nous sommes en 1937, le peintre est professeur de dessin au lycée français de Hué depuis 1931. Il s’agit de l’une de ses dernières œuvres dessinées avant son départ définitif pour la France, à l’occasion de l’Exposition internationale des Arts décoratifs, quelques mois plus tard. Ce voyage fut décisif. Né au Vietnam, Mai-Thu a effectué sa scolarité au lycée français de Hanoï avant d’intégrer, en 1925, la première promotion de l’École des beaux-arts de cette capitale du Tonkin, fondée par Victor Tardieu et Nguyen Nam Son. En France, il expose dans divers galeries et salons et accède très vite à la notoriété, se faisant connaître au travers d’émissions de radio et de concerts, comme joueur de doc-huyen, instrument monocorde traditionnel vietnamien. Comme ses contemporains, il est partagé entre l’enseignement européen et son attachement à l’art traditionnel asiatique. En 1948-1949, il signe la réalisation d’un documentaire sur la technique de la peinture sur soie, présenté à plusieurs reprises à la Cité universitaire de Paris et au musée de l’Homme. Notre tableau a été acquis en 1937 par monsieur C., médecin français établi à Hué, puis à Faifo (actuelle Hôi An), Nha Thrang et à Saigon, entre 1941 et 1958, où il officia auprès de l’impératrice Nam Phuong (1913-1963). Son nom sera communiqué à l’acquéreur.